mercredi 27 juin 2018

Lumière sur Marie-Magdeleine Brebant

Aujourd’hui, pleine lumière sur une lointaine grand-mère Marie-Magdeleine BREBANT à  la 10ème génération, puisqu’à la roulette des ancêtres, j’ai tiré le numéro 389. (1) Une manière comme une autre de dresser un fil de vie d’une invisible aïeule.
 
En route donc, pour la Picardie, et Barisis aux Bois où Marie-Magdeleine BREBANT- première enfant de Pierre BREBANT et de Jacqueline LENOIR - est baptisée le 27 mars 1679 à l’âge d’un jour. Seul le nom de son parrain est lisible : un dénommé Jacques CARLIER, sa marraine est victime de la fuite du temps
 
De même l’année précédente le 8 février 1678, l’acte de mariage de ses parents ne révèle que la filiation de l'épouse à savoir : Jean LENOIR et Nicolle NOYON, le registre usé et écorné ne permet pas de lire la filiation de l'époux.
 
Lointaine Marie-Magdeleine, je te connais un frère Denis et une sœur Marie-Anne, ainsi qu’un cousin Charles BREBANT qui sera témoin à ton mariage le 1er février 1700 alors que tu as 19 ans et que tes parents sont déjà décédés.  Ce jour-là en devenant l’épouse de Pierre JONQUOY bûcheron - fils de Jacques JONQUOY tisserand et de Catherine LECLERC - tu entres dans une famille nombreuse.
 
Gallica -  F Boucher paysanne à la cruche
Ton enfance se déroule sous le règne du roi Louis XIV dit « Roi-Soleil » jusqu’en 1715 et ta vie se prolonge sous celui du roi Louis XV dit « le bien-aimé » enfin pas tant que cela ! Mais les échos du royaume  parvenaient-ils jusqu’à une modeste épouse de bûcheron ?
 
Si je me réfère à un rapport de 1698 de l’Intendant de la Généralité de Soisssons dénommé  Houssaye celle-ci comprenait 246 000 âmes pour le territoire qui correspond à l’Aisne. Pour des villes dont tu as peut-être entendu parler - ou du moins les hommes de ton entourage - La Fère ville militaire avait 1600 âmes et Coucy le Château 800 âmes.
 
Sache que ce même intendant qualifiait ainsi tes congénères «  les habitants ont l’esprit vif et dur, ils sont laborieux et portés au commerce » mais disait aussi «  les habitants des villes ont l’esprit assez vif quoiqu’ils soient paresseux et portés au repos, ceux de la campagne sont plus laborieux » et également jugés « aimant la guerre et bons cavaliers ».
 
Mais bon au cours de ton existence dans le même village,  point n’était besoin pour toi de te référer au rapport dudit Intendant pour savoir que l’exploitation forestière était très importante pour ton pays et ta paroisse entourée par la forêt de Saint-Gobain et de Coucy, hautes futaies de hêtre ou de taillis. Ton époux en tant que bûcheron a côtoyé entre-autre Louis DAUBENTON mon ancêtre garde-vente des coupes de bois dans la forêt.
 
La référence au métier de tisserand de ton beau-père - qui devait donc détenir un métier à tisser - renvoie au travail du chanvre très important à Barisis aux Bois.
 
Marie-Magdeleine, grâce aux petits cailloux semés par d’autres généalogistes, mes modestes recoupements, mais surtout les registres tenus par les prêtres de la paroisse,  je sais  que tu as donné 10 enfants à Pierre JONQUOY bûcheron. Neuf grossesses entre 1701 et 1721, dont des jumeaux, soit un chapelet de prénoms avec 3 petits Pierre, le dernier étant mon ancêtre direct..
 
Tu perds 3 enfants en bas-âge à mon sens, et aussi ta fille Marie-Magdeleine décédée subitement à 27 ans en 1730 d’une crise d’épilepsie, le haut-mal comme on disait autrefois.
 
Mais Marie-Magdeleine au cours de ta longue vie tu as le bonheur de marier 3 de tes filles et 2 de tes garçons entre 1725 et 1750, et même d’assister à l’union de trois de tes petits-enfants, ce n’est pas rien à cette époque. Tu as aussi été arrière-grand-mère, mais les petits êtres sont si fragiles, des petits anges souvent.
 
J’imagine que le prêtre de Barisis aux Bois t’a informé du mariage de ton frère Denis BREBANT en 1713 dans la Meuse à Mouzay avec une fille d’un maréchal des logis (donc un militaire) puisqu’il a  établi un certificat. Celui-ci a fondé par là-bas une branche de ta famille.
 
Gallica - A Legros les bûcherons
Hélas ton époux Pierre JONQUOY décède le 19 juillet 1739 à 62 ans, usé par un dur labeur vraisemblablement. Tu es alors entourée par tes trois fils Pierre JONQUOY mon aïeul, Louis-Jacques et Jean JONQUOY, ainsi que tes gendres Simon MAREST et Jean-Louis BERTON qui tous signent l'acte d’inhumation : de vraies signatures.  Tisserand, bûcheron, clerc séculier aussi, votre famille avait donc la possibilité d’envoyer les enfants à l’école pour un minimum  d’instruction
 
Simple mise en lumière de Marie-Magdeleine BREBANT, une ancêtre du haut de mon arbre, qui quitte les siens le 4 mars 1760 octogénaire à Barisis aux Bois.
 
Le siècle qu’elle quitte est dit Siècle des Lumières où écrivains et penseurs français « les philosophes » Voltaire, Montesquieu ou Diderot se fixent comme objectif de combattre les ténèbres et l’ignorance par la diffusion du savoir et se lancent notamment dans une Encyclopédie.
 


Pierre JONQUOY 1677-1739 Sosa 388
 fils de Jacques et Catherine LECLERC
marié en 1700 à
Marie-Magdeleine BREBANT 1679- 1760 Sosa 389
 fille de Pierre et Jacqueline LENOIR
 
10 enfants
- Marie-Jeanne JONQUOY 1701-1762 ⚭ Simon MAREST
- Marie-Magdeleine JONQUOY 1703-1730
- Pierre JONQUOY 1703- ?
- Marie-Marguerite JONQUOY 1705- ?
- Pierre JONQUOY 1706- ?
- Pierre JONQUOY 1759-1762 Sosa 194 ⚭ Angélique FOSSIER Sosa 195
- Anne JONQUOY 1711- ? ⚭ Jean-Louis BERTON
- Louis-Jacques JONQUOY ca 1715-1753  ⚭ Marie SALOT
- Marie-Anne JONQUOY1717-1756 ⚭ Jean GUERIN ⚭ Jean LEVEQUE
- Jean JONQUOY 1721-1744
 
 

(1) sur l'idée du Généathème de juin
d'un numéro tiré au hasard par le générateur Sosa de Sophie de « la  Gazette des Ancêtres »

Autre portrait d'une ancêtre : Dépoussiérer Marie-Catherine Rossignol

Sources
AD 02 Barisis aux Bois BMS
Généanet

samedi 16 juin 2018

Le Bouquet Provincial d'Isabelle et Emile

Parce qu’Isabelle et Emile mes grands-parents maternels ont été jeunes, parce qu’on est au mois de juin, le rendez-vous ancestral mensuel (*) me donne l’occasion d’être propulsée à Braine dans l’Aisne le dimanche 30 juin 1912 exactement.

Venant de Soissons par le train, au début j’ai admiré le paysage, ensuite mon esprit s’est évadé dans le passé ; si bien qu’au crissement strident des freins de la locomotive en gare de Braine et au brusque arrêt du convoi, je me suis retrouvée à destination vêtue différemment.
 
Bon ne pas m’entraver avec ma jupe longue en descendant du wagon, et redresser mon chapeau de paille, ciel que cette ceinture me serre ! Quelle animation devant la gare et que se passe-t-il ? On dirait qu’il y a une fête.
 


 
Bouquet Provincial à Braine - Delcampe

Vais-je trouver le quartier des écoles faute d’avoir les deux domiciles d’Isabelle ARNOUX institutrice fiancée à Emile Octave Georges MERCIER instituteur ? Isabelle en poste depuis 1908, doit être en chambre meublée chez une personne qui fait pension de famille, puisqu’elle est originaire de la Drôme où ses parents sont agriculteurs à Montmeyran. Quant à Emile il n’est pas davantage chez ses parents qui demeurent à Barisis aux Bois dans l’Aisne.
 
A mon grand étonnement, je découvre sur l'avenue de la gare comme un rassemblement : des porte-drapeaux, des musiciens, des jeunes filles en longue robe blanche. De nombreux badauds de tous âges et conditions ; tout cela est curieux, il faut que je me renseigne.
 
- Oh mais ma petit’dame c’est le Bouquet Provincial aujourd’hui dans notre belle Picardie ! Vous n’êtes pas d’ici alors pour ne pas savoir ? 

Vu mon air hébété, l’homme de poursuivre obligeamment :
-  C’est une fête populaire juste avant la saison de compétition des compagnies de tir à l’arc de la région.
 
- Vous savez ma petit’dame, cette célébration se poursuit par un concours de tir par la compagnie de l’arc qui reçoit, toutes les fins de semaine, les autres compagnies participantes dans son jeu à l’arc. Faut peut-être que je vous dise aussi que les deux cibles sont à 50 mètres l’une de l’autre, et que l’archer tire alternativement sur l’une puis sur l’autre cible.
 
- Faut que je vous dise aussi que ce  défilé du Bouquet Provincial rappelle les parades militaires du temps où il y avait des rois. Les concours, ou  les tournois  permettaient aux guerriers de s’entraîner et de se mesurer les uns aux autres dans les temps de paix. C'est Saint-Sébastien le patron des archers.
 
- Vous allez pouvoir vous promener dans la ville de Braine en liesse et tout découvrir avec le beau temps.
 
Bonne introduction, mais comment je vais dénicher Isabelle et Emile dans toute cette foule ?

Remise du Bouquet Provincial à Braine - Delcampe

Laissant trainer mon oreille :
- Oh regarde, on va voir les compagnies qui présentent leur drapeau pour retirer un numéro d’ordre dans le défilé. C’est le tambour de notre compagnie de la Ronde de Braine qu’on entend, vois sur son drapeau il y a un corbeau !

Que de monde sur le parcours du défilé au cœur de la ville : les habitants ont décoré les rues, leurs maisons, les commerçants leurs vitrines avec des fleurs en papier, sous des arcs de triomphe également recouverts de fleurs passent les archers. Que de gaité, des enfants courent dans tous les sens, les passants s'interpellent.
 
Comment vais-je repérer mes fiancés, se tiennent-ils par la main, à moins qu’Emile offre galamment son bras à sa chère Isabelle ? Bon je cherche un homme jeune à la fine moustache grand pour l’époque : 1 m 75, alors que sa fiancée aux yeux gris-bleu et aux joues rondes ne dépasse pas trop 1 m 50.
 
Rue du Martroy : pas mes ancêtres, et si je me rendais rue Saint-Yved où il y a une école ?

Bonne pioche et miracle d’un rendez-vous ancestral,  je tombe pile-poil sur mes deux tourtereaux. Lui, canotier de rigueur, costume et montre à gousset ; elle chemisier clair, petit chapeau, mais j'ai diablement un vocabulaire défaillant dans le domaine vestimentaire pour être plus précise.

J’entends mon Emile très fier d’expliquer sa région à sa petite fiancée drômoise, mais n'ose pas trop le regarder sous le coup de l'émotion de cette rencontre. Je me sens bizarre.
 
- Regarde Isabelle : en tête de la procession, des jeunes filles en blanc portent le vase du Bouquet qui se transmet de la compagnie organisatrice l’année passée à notre  compagnie de Braine. On verra ensuite le vase de Sèvres offert par le Président de la République qui sera remis à l’archer vainqueur de la compétition dans la catégorie arc classique.
 
- Regarde Isabelle : les compagnies dites aussi Rondes défilent derrière leur drapeau sur deux rangs, les rois ayant abattu l’oiseau, puis les empereurs ayant été rois trois années de suite, les capitaines et connétables de compagnie  portant leurs écharpes.
 
Petite voix d’Isabelle, histoire de participer :
- Là ce sont les chevaliers et les archers et je constate les différences de tenues des compagnies.
 
Avec le bruit des groupes de musique du défilé, les propos suivants me sont inaudibles.
 

La Compagnie d'Arc de Braine - Delcampe
 
Un docte monsieur claironne : on va aller écouter le discours d’une jeune fille de la compagnie ayant accueilli le Bouquet l’année précédente, qui rappellera  les « valeurs » de cette fête avant de remettre le vase du Bouquet à la compagnie de Braine organisatrice.
 
Le même individu précise qu’ensuite il y a la messe célébrée en l’honneur des archers à laquelle chaque porte-drapeau doit impérativement assister.
 
Un mouvement de foule me permet d’être à nouveau au niveau des fiancés : au doigt d’Isabelle la fine bague de fiançailles offerte par Emile en témoignage de son amour : des feuilles de gui en or jaune avec de petites perles, le gui porte-bonheur. Précieuse bague en ma possession et souvenir d’un temps de bonheur trop court hélas.

Ils se marieront huit semaines après cette fête du Bouquet Provincial : le 24 août 1912 dans le pays natal d’Isabelle.

Et bien mes deux tourtereaux vous pouvez vous vanter de m’avoir fait entrer dans l’univers particulier d’une tradition picarde qui demeure encore ancrée en 2018 à Braine. Comme quoi la généalogie mène vraiment à tout.


 
 
(*)  RDVAncestral initié par Guillaume du Blog « Le Grenier de nos Ancêtres » 

Pour retrouver Isabelle :
- le billet  : L'alphabet d'Isabelle
- le billet : Isabelle seule avec Jeanne pendant 4 ans

 
Nota bene :
Le Bouquet Provincial ou  Tir Beursault figure depuis 2015 à l’inventaire du Patrimoine Culturel Immatériel au titre des pratiques physiques traditionnelles à côté par exemple de la pelote basque à main nue en triquet, de l’alpinisme ou de la colombophilie. 

samedi 9 juin 2018

Charles un nourrisson du 18e siècle

C’est pour ainsi dire la condition du tout petit enfant au 18e  siècle, fut-il enfant d’un artisan ayant pignon sur rue à Paris. Tout a commencé par une pensée émue pour un petit Charles en feuilletant le registre de 1771 de Barisis aux Bois, village situé autrefois dans le bailliage de Coucy et actuellement dans l’Aisne.
 
Le 23 février 1771, un nourrisson âgé d’un mois était inhumé dans le cimetière de la paroisse par Dom Jonat Farineau, en présence de Pierre Ruelle et Jacques Pasques clerc laïc les témoins. Il n’était pas un enfant abandonné.
 
Charles était le fils de Mr Jacques Michel Liégeois maître-rubanier et de Michelle Magdeleine Alexandrine Barré demeurant à Paris rue Saint-Denis dans la paroisse de Saint-Nicolas aux Champs. Agé d’un jour, tout juste baptisé, il avait été donné en nourrice à Marguerite Servas femme d’Alexis Pierret berger demeurant à Barisis le 20 janvier 1771.
Delcampe Eglise St-Nicolas aux Champs à Paris
Aux 17e et 18e siècles, bien des paroisses du Soissonnais et du Laonnois entraient dans la clientéle des bureaux parisiens chargés du recrutement des nourrices, paroisses qui avaient la préférence des familles de la capitale pour envoyer leurs enfants en nourrice.
 
Le maître-rubanier et son épouse, qui devait l’aider dans son activité et ne pouvait souscrire aux contraintes de l’allaitement, avaient donc eu recours au bureau des recommandaresses pour la location des nourrices  véritable marché de lait humain.
 
Savaient-ils que le souverain, conscient de graves abus avait pris des dispositions pour encadrer ce recrutement, qui pourtant était bien nécessaire pour soulager les citadins, et apporter un utile complément de ressources pour la population rurale moins favorisée.
 
Savaient-ils que le meneur venu de province avec les nourrices, tout comme celles-ci, devait fournir du curé de leur paroisse un certificat déclinant identité, mœurs et religion, et que la nourrice choisie ne pouvait avoir qu’un enfant en plus de son propre petit et en prendre soin.
 
Gallica
 
Dans chaque paroisse le curé avait la mission de veiller sur les nourrissons. Pour chacun d’eux, il a reçu un certificat délivré par le bureau de placement et portant le nom de l’enfant, les noms des père et mère, leur profession et leur adresse. Les nourrices étaient surveillées non seulement par le curé, mais aussi par les meneurs, placés eux-mêmes sur la surveillance de la police qui exigeait des rapports fréquents et circonstanciés.
 
Pour le placement du petit Charles, le maître-rubanier s’était acquitté de 31 sous auprès du bureau des recommandaresses, et devait prévoir les gages de la nourrice de 8 livres par mois pour le sou pour livre.
 
C’est ainsi que le petit Charles partit avec sa nourrice Marguerite Servas à plus de 150 kilomètres de la capitale, avec d’autres nourrissons et d’autres nourrices, sous la houlette du meneur. Long et incommode déplacement, qui devait se faire dans une voiture avec de la paille fraîche sur le fond en planches, les ridelles aussi closes avec des planches, une bonne toile devant couvrir ladite voiture.
 
Logiquement des bancs devaient permettre aux nourrices de surveiller les bambins et prévenir les accidents qui pouvaient survenir en cours de route. Le meneur ne devait pas abandonner les enfants, ni les exposer dans un tour d'un hospice, et une fois arrivées les nourrices ne devaient pas donner leur enfant à une autre nourrice, à peine de sanctions.
 
En dépit des précautions administratives, les nourrissons n’étaient guère assurés d’un traitement convenable.
 

AD 02 BMS Barisis

 
Dans l’ensemble les familles parisiennes qui envoyaient leurs nouveau-nés en province étaient de condition modeste. On trouve des commerçants, des artisans, des agents de l’administration, qui sans avoir les moyens d’entretenir une nourrice à demeure, parvenaient à tenir leurs engagements. Mais beaucoup d’autres parents, aux revenus incertains, versaient irrégulièrement ou même cessaient de payer les gages à la nourrice : à telle enseigne qu’un arrêt du conseil du Roi avait ordonné la contrainte par corps des pères défaillants.
 
Les patronymes des parents nourriciers du petit Charles m’étaient inconnus, contrairement à d’autres familles où étaient gardés des enfants abandonnés de Paris. Marguerite Servas a-t-elle bien rapporté ou retourné au maître-rubannier les hardes de l’enfant avec le certificat de mort, comme elle en avait l’obligation ?
 
 

Sources :
AD Aisne BMS Barisis 1771-1790 vue 9
Charles Kunstler La vie quotidienne sous Louis XVI
Gallica :
Déclarations concernant les recommandaresses et les nourrices
 
Pour aller plus loin :
Persée Emmanuel Leroy-Lardurie  L'allaitement mercenaire en France au XVIIIe