samedi 25 janvier 2020

Le désespoir de Frédéric Barbier

En 1845 Frédéric Barbier avait 19 ans, il était tailleur d’habits et demeurait à Montmeyran dans la Drôme : c’était le beau-frère de Marie-Anne Arnoux une lointaine grand-tante. 

Son désespoir a plongé sa famille dans l’affliction et étonné son entourage très certainement, si je me réfère à la presse ancienne.

Pixabay

Le Constitutionnel du 5 décembre 1845 dans un article reprend les termes du correspondant du Courrier de la Drôme :

« Jeudi au soir 13 novembre, le nommé Frédéric Barbier, ouvrier tailleur, natif de Montmeyran où il demeurait avec sa mère, vient de se suicider à l’âge de dix-neuf ans, sans que l’on sache attribuer, cette fatale résolution. Ce malheureux jeune homme s’est donné la mort à l’aide d’un fusil chargé à plomb, qu’il était aller emprunter dans une maison voisine. L’arme a été appuyée contre l’oreille, et la détente agitée par un bâton, a fait partir le coup qui lui a brisé le crâne. 

Frédéric Barbier s’était placé au bord d’un ruisseau à une centaine de mètres de chez lui. Quelques personnes ont entendu une explosion jeudi au soir, mais ce n’est que vendredi matin que le cadavre a été trouvé. On a remarqué sous ses pieds un couteau ouvert, et sur un tronc d’arbre une bourse vide, ainsi qu’un étui et un dé à coudre qui se trouvaient à côté ».


Le suicide rappelons-le est réprouvé par l’Eglise Catholique, et en 1845 il était hors de question que le Curé de la paroisse intervienne lors de l’enterrement de Frédéric Barbier.

« Notre correspondant dit le Courrier de la Drôme ajoute que, le clergé ayant refusé la sépulture, un homme respectable par son âge et ses qualités M. Jacques Faure protestant et zélé dans sa religion s’est présenté au moment du convoi, et a fait aux jeunes gens présents la morale sévère en mettant ce triste exemple sous les yeux, et en puisant dans l’Ecriture-Sainte les textes qui pouvaient s’appliquer à la circonstance. Il a terminé en faisant avec les assistants une prière de cœur pour celui qui faisait l’objet de leur réunion ». 


Ainsi se déroula l’inhumation de ce jeune désespéré, sa mère Jeanne Malleval était veuve de Jean Barbier, il lui restait deux fils dont Jean Antoine époux de Marie-Anne Arnoux. Ils habitaient le hameau des Dorelons comme mes ancêtres Jacques Arnoux et Marianne Savoye. 

AD 26 Montmeyran EC

Le jour même de la découverte du suicide, Jean Antoine Barbier alla déclarer le décès de son frère à la Mairie accompagné de Louis Ban tous deux cultivateurs. Rien dans la teneur de l’acte ne laisse transparaître ce drame qui a été relaté dans le journal. L’acte a la rédaction habituelle et réglementaire, il est dressé par Hypolithe Sayn adjoint agissant comme officier d’état civil, le Maire étant empêché. 

J’ai des interrogations : qui a prêté le fusil, qui est le correspondant, le Maire ou son adjoint s’est-il rendu sur les lieux, voire un garde-champêtre, à défaut de la maréchaussée ? 

Diversifier les sources, farfouiller dans différents documents en ligne, confirme que la vie n’est pas un long fleuve tranquille et que de tout temps on a souffert du mal-être. 

Frédéric Barbier un fil de vie entre deux actes d’état-civil et un article de presse. 



Marie-Anne Arnoux et Jean Antoine Barbier sont évoqués dans le billet :
Le petit monde de Marianne Savoye


Source
Retronews : Le Constitutionnel du 5 décembre 1845 citant le correspondant du Courrier de la Drôme

samedi 18 janvier 2020

Une flopée d'enfants pour Daniel Lagier

A nous deux Daniel Lagier ! Ce trisaïeul est le père de mon arrière-grand-mère Noémie.

Daniel au prénom hébraïque qui signifie Dieu est mon juge, porté par un prophète qui ne fut point dévoré par les lions, et au patronyme Lagier - à rapprocher de Léger ou Laugier dans sa variante méridionale – qui renvoie à une personne d’origine germanique prête au combat.

Avec ce préambule ne sois pas étonné que je ne sache comment t’aborder.

MBA Lille - Pierre Alexandre Edmond Hedouin 
Troisième enfant et second fils de Jacques Lagier maçon et de Marianne Lantheaume, tu as poussé ton premier cri à 10 heures du soir le 13 floréal de l’An XII à Pontaix dans la Drôme, soit le 3 mai 1804. Tu passeras tes premières années dans ce village à la belle lumière, aux ruelles étroites et pavées dominées par les ruines d’un ancien château. Je t’imagine courant avec d’autres enfants, ou pataugeant dans la rivière en contre-bas, vous éclaboussant.


Où es-tu allé à l’école, puisque je situe entre 1810 et 1823, l’installation de ta famille à Upie dans la plaine de Valence aux terres plus riches. Ta sœur Marie y décède en 1824 et Jacques ton frère aîné convole l’année suivante.


Toi Daniel je te retrouve vraiment lors de ton mariage civil le 23 février 1833 : un samedi à 6 heures du soir à la mairie d’Upie. Fringant trentenaire cultivateur - et néanmoins épris je l’espère - tu épouses Elisabeth Métifiot couturière fille d’Etienne Métifiot meunier et de Catherine Masserolle ménagère. Je la tiens ta première signature, ton père cultivateur tout comme la future et les mères sont dits illettrés.

Cette brève cérémonie en fin d’après-midi est peut-être liée au décès récent du père de la mariée, et puis la bénédiction de l’union a dû intervenir ultérieurement au temple tout neuf de Montmeyran.

Ensuite, ensuite, Daniel et Elisabeth j’ai découvert de nombreuses naissances, suis-je autorisée à dire trop en pensant à la maman.

D’un côté cinq garçons : Daniel le premier-né ne vécut que 9 mois, Pierre-Daniel - né en 1835 fût caporal d’un régiment de voltigeurs de la Garde Impériale et décéda à Paris en 1868. (1)

Puis le mystérieux Rémy dont on perd la trace après 1861, est-il vraiment parti en Amérique selon une légende ? Sans oublier Casimir qui s’est marié et Ferdinand célibataire, ils sont tous deux restés au pays.

Côté donzelles au nombre de six … Ai-je parlé à haute voix ?

Oui alors, que sais-tu ? Tu t'y retrouves dans les dates et les prénoms ?

Me voilà accostée par Daniel Lagier, que je n’ai pas vu ni entendu arriver. Il est vêtu d’un pantalon de velours, ceinture de flanelle sous une veste de drap, et porte un couvre-chef au large bord, des moustaches évidemment, septuagénaire a priori vers 1875.

Elisabeth et Marie-Adeline sont mariées à des cultivateurs et demeurent au village, Mélanie cafetière est installée en ville à Valence. Dans les cadettes Polonie vous a quitté trop vite, Fanie-Louise est partie enseigner le français Outre-Manche.

Noémie-Olympe la petite dernière, mon ancêtre née le jour de Noël 1848, tient une place particulière dans mon cœur. (2)

AD 26 Upie Recensement 1851

Le logis au lieu-dit Les Vesonnières devait être plein de vie, de cris d’enfants, de voix graves ou de confidences entre sœurs, de houspillement de la mère, d’ordre bref du père.

Des phrases décousues tournent et virent dans mes pensées, fruits de trouvailles au fil d’actes d’état-civil, de recensements, de cartes : moments d’émotion, d’étonnement, de peine parfois.

Daniel Lagier, qui se déclare agriculteur, propriétaire, maçon dans son jeune âge, puis presseur d’huiles, maître de pressoir, m’a-t-il écouté ou peu lui chaut, car il est fatigué, préoccupé.

Rendez-vous imaginaire et furtif : un jour peut-être, il me ferait visiter sa maison, il m’expliquerait ses tâches de presseur d’huiles (de noix a priori), dans l’immédiat il grimace en lisant ce petit texte un peu sommaire.

Flopée d'enfants, panel de signatures.


Situation imaginée 
mais personnes liées à ma généalogie
selon les principes du RDVAncestral





Daniel Lagier 1804-1878 Sosa 30
fils de Jacques Lagier et de Marianne Lantheaume 
x 23/02/1833 à Upie
Elisabeth Métifiot 1810-1897 Sosa 31
fille d'Etienne Métifiot et Catherine Masserole 

- Daniel 1833-1834
- Pierre-Daniel 1835-1868
- Elisabeth 1837-1926 x Jacques Léopold Dorelon
- Rémy 1838 - ?
- Mélanie 1840-     x Pierre Ferdinand Mognat x François Antoine Teissier 
- Casimir 1841-      x Marie-Eugénie Desbrun
- Marie Adeline 1844-1910 x Pierre Eugène Dorellon
- Ferdinand 1842-1923
- Polonie 1845-1855
- Fannie-Louise 1847- ?
- Noémie 1848-1921 Sosa 15 x 1875 Jean Pierre Arnoux Sosa 14