Dans la famille Barnier de Chabeuil en Dauphiné, je demande le neveu d’Abraham : Jean Pierre en l’occurrence afin de rester dans mon thème sur la draperie. Ce collatéral vivant au 18ème siècle, fils de Jean et d’Isabeau Richard né en 1705, convole en 1729 avec Lucresse Dupré.
Tondeur de drap © Bibliothèque de Lyon |
Rappelez vous, Abraham Barnier mon ancêtre drapier a explicité les premières étapes de la transformation de la laine qui doit être lavée, séchée, triée, cardée avant d’être filée et tissée.
Sachez que le drap du tisseur est une toile épaisse et grosse qui nécessite ensuite d’être foulée, puis feutrée ou lainée.
A ce stade le drap lainé est remis au tondeur et Jean Pierre Barnier intervient.
Sur sa table revêtue d’un coussin, il étend le drap dans sa largeur et le fixe avec des crochets, debout bien calé sur un marchepied, il s’apprête à couper le poil avec des forces ou gros ciseaux de 1,30 mètres de long et pesant environ 18 kilos, ciseaux constitués de branches parallèles réunies par un ressort qui en facilite le jeu.
Raser de près les poils des deux faces de la pièce, implique de veiller à ce que les coups soient égaux afin que la surface de l’étoffe soit unie.
Ce travail difficile, épuisant, nécessite à la fois un coup d’œil précis et un savoir incorporé fait de force et de finesse, aussi les tondeurs travaillent en général à deux leur drap sec.
« À voir travailler un tondeur, on s’imaginerait qu’il ne fatigue pas, cependant, il est reconnu que le métier de tondeur est le plus rude de toute la fabrique : les tondeurs fatiguent encore plus quand ils ont de mauvaises forces, ou qu’elles sont mal émoulues.
Dans ce travail, tous les membres sont en action et continuellement tendus pour tenir la force en respect : le talon de la main droite est surtout la partie qui fatigue le plus, aussi les apprentis se plaignent-ils qu’ils souffrent de tous leurs membres, et surtout du bras droit qui leur devient enflé. »
Cette citation de Duhamel de Monceau dans son Art sur la Draperie donne là une description précise et juste du travail du tondeur ainsi que sa difficulté au 18ème siècle.
Jean Pierre Barnier mon collatéral, dit maître-tondeur, faisait-il partie d’une communauté ou corporation à Chabeuil ? Je n’ai pas d’élément sur ce point.
Chaque maître doit avoir chez lui un morceau de fer tranchant par un bout, qui est une espèce de poinçon, qui sert à marquer toutes étoffes qu’il tond ou qu’il fait tondre par des compagnons, cette marque se fait au premier bout ou chef de la pièce. Il n’est pas permis à un maître de continuer à tondre une pièce déjà commencée et marquée par un de ses confrères.
Grâce à la notice de l’Abbé Vincent sur Chabeuil, je sais que pour empêcher toute contravention aux règlements et aux statuts qui concernaient la draperie, il y avait dans la ville un bureau, où l'on déposait les draps pour qu'ils fussent marqués et inspectés plus commodément par les juges de police des manufactures du Dauphiné.
A ce bureau étaient attachés plusieurs gardes-jurés, qui avaient pour fonctions de visiter les drapiers trop éloignés de la communauté, d'inscrire sur un registre, jour par jour, toutes les pièces, toutes les étoffes qui étaient visitées et marquées, avec le nom des marchands et des fabricants.
Un brin de généalogie, un éclairage sur les tâches d’un collatéral, un zeste d’histoire.
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Sources
- Encyclopédie de Diderot et d'Alembert
Version numérique ENCCRE Laine et draperie
- Abbé Vincent Notice historique sur Chabeuil 1847 sur Gallica
bonjour et merci pour cet article éclairé; j'ai aussi des ancêtres tondeur qui était à Vienne avant de s'expatrier dans les mines de charbons de la Loire;
RépondreSupprimerheureuse que ce billet "résonne" aussi dans votre généalogie
SupprimerC'est super de pouvoir ainsi entrer dans les détails d'un métier, un véritable apprentissage !
RépondreSupprimerComme c'est intéressant ! On peut ainsi se rendre compte que c'est un métier qui nécessite une bonne technique.
RépondreSupprimermerci pour cette immersion dans la pratique d'un métier ancien méconnu
RépondreSupprimerFils d’une Isabeau et époux d’une Lucresse, le voyage s’annonçait prometteur. Il fut passionnant ! Jolie plongée dans les coulisses d’un métier disparu 👏👏
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