C’est à Orléans, dans département du Loiret, que réapparait Jean Louis Demilly l’éphémère époux de Félicité Lefort ma lointaine grand-tante.
Ce fringant militaire, au bord de la Loire, a emberlificoté une séduisante coiffeuse de 21 ans.
Gallica |
Le citoyen Demilly, âgé alors de 32 ans, est domicilié 5 rue du Cheval Rouge à Orléans (5ème section), tout comme sa belle citoyenne fille de Claude Jacques Champion et Françoise Ratoré.
Papa Champion est présent et consentant, le futur a comme témoins deux amis : un aubergiste et un employé du département en ce printanier 6 mai 1796.
Appliqué, l’officier d’état civil stipule que ledit Demilly, né à Amigny-Rouy en 1769 dans l’Aisne, est fils de feu Pierre Demilly et Marie Magdeleine Moreau, et a communiqué son acte de naissance et l’acte de décès de son père.
De même ce fier militaire a fourni « un certificat authentique du Conseil d’Administration du Premier Bataillon du Vingt troisième Régiment d’Infanterie Légère, du 15 présent mois, délivré à Argenton le Peuple (Département des Deux-Sèvres) par lequel il appert que ledit futur n’a jusqu’à ce jour contracté aucun mariage ».
Aucun doute l’homme est bien l’ancien époux de Félicité Lefort ma collatérale, dont le mariage religieux de 1791 vient d’être dissous civilement le 16 février 1796 à Barisis dans l’Aisne à 250 kilomètres d’Orléans.
Jean Louis Demilly peut fort bien convoler civilement en justes noces, mais le libellé de l’acte de mariage laisse entendre que sa nouvelle dulcinée et ses parents ne sont pas au courant d’une union précédente et d’un divorce, nullement mentionnés, par l’officier d’état-civil.
AD 45 Orléans extrait EC 1796 |
Et la vie continue, avec la naissance le 13 mars 1797 de Pierre Louis Alphonse Demilly déclarée par le père redevenu charpentier.
S’en suit, toujours à Orléans, la naissance de Pierre Alexandre Demilly le 28 janvier 1799 déclarée cette fois-ci par l’officier de santé, vu l’absence pour affaires du père charpentier, avec comme témoin le grand-père Champion portier à la Maison d’Arrêt !
Puis coup de tonnerre dans le foyer, s’en est trop pour la nouvelle épouse Jeanne Victoire Champion, comme bien d’autres femmes, elle entame une procédure de divorce en vertu de la loi du 20 septembre 1792.
Sur le registre d’état-civil au 27 janvier 1804, soit le 6 pluviôse de l’an XII, un acte de divorce de plus de quatre pages, d’une écriture serrée, détaille la procédure avec les motifs et doléances de la requérante.
Au fil des lignes on découvre que deux enfants mâles demeurent à la charge de Jeanne Victoire Champion, et que celle-ci avec « prévenances, douceur et patience a tout mis en œuvre pour tâcher de vaincre l’humeur difficile et le caractère fougueux de son époux trop enclin à la dissipation et à la débauche, elle se flattait que la naissance d’un enfant, la qualité de père, pourrait le toucher apaiser ses réflexions et le rendre plus traitable envers son épouse »
« Vain espoir, aucun changement, toujours les mêmes duretés, enfin lassée d’une existence aussi pénible ladite Champion engage une première procédure qui débouche sur une conciliation.»
Naïve Jeanne Victoire, trop confiante.
« Quand son mari revient dans les apparences de repentir et de regret, lui promettant une conduite plus digne de lui et d’elle, confiante de ses promesses elle l’accueillit de nouveau trop heureuse de retrouver son époux, père de ses enfants, mais il oublia bientôt ses nouvelles dispositions qu’il lui avait montrées et se livra de plus fort à ses emportements et qu’il n’avait pas honte de ses outrages. »
« Désespérée de sa condescendance qui lui a fait perdre le fruit de sa première procédure, elle se détermina à recommencer la procédure et demande un divorce pour cause d’incompatibilité d’humeur et de caractère. »
Et bis repetita des diverses formalités…
Et là, enfin, après l’acte définitif de non-conciliation du tribunal civil, le maire constate le divorce en l’absence de Jean Louis Demilly. Voilà une étape douloureuse terminée pour Jeanne Victoire, elle est libre et seule avec deux garçons.
Tiens voici l’aîné Pierre Louis Alphonse Demilly, devenu commis-négociant, qui se marie à Saint-Saulge dans la Nièvre le 6 novembre 1820, sa mère est présente et consentante toujours domiciliée à Orléans.
Le marié pour son père justifie qu’il est « absent depuis plus de vingt-deux ans, sans avoir pu recevoir de ses nouvelles, ainsi qu’il résulte d’un acte de notoriété établis par devant Me Bernard et son collègue notaires à Orléans le 29 septembre dernier et enregistré le 2 octobre suivant légalisé par le président du tribunal civil dudit Orléans le 3 octobre du même mois. »
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Dans la nature le dénommé Jean Louis Demilly ?
En tant que charpentier compagnon, il fait étape à Septeuil dans l’ancienne Seine et Oise – actuellement les Yvelines - où il reconnaît le 10 novembre 1809 un fils naturel Louis Ambroise Demilly issu d’une liaison avec Marie Victoire Moulin.
AD 78 Septeuil EC 1809 |
Devenu adulte Louis Ambroise, chartrier, se marie à Crespières le 28 septembre 1831. Sa mère atteste « la reconnaissance de la disparition du père du futur qui a quitté Septeuil environ huit ou dix ans après la naissance de son fils et que depuis son absence il n’y a pas eu moyen de découvrir sa résidence actuelle cela attesté par acte de notoriété dressé par procès-verbal en présence de témoins devant monsieur Jacques Nicolas Erard juge de paix du canton de Houdan. »
L'histoire se répète, le sieur Demilly a déserté une fois de plus vers 1820, abandonnant épouse, compagne et enfants, disons pour trouver de nouveaux chantiers ...
Toujours est-il, que pister l’ex-conjoint de ma lointaine grand-tante, m'a fait découvrir le caractère et le tempérament d'un turbulent personnage, et rencontrer des femmes qui se sont occupées de leurs enfants, malgré leur histoire d'amour malheureuse.
A croire que les prénoms de Félicité, Jeanne Victoire et Marie Victoire portent la poisse.
Retrouver Le divorce de Félicité Lefort ICI
Sources
AD 02 BMS & EC Amigny-Rouy et Barisis
AD 45 EC Orléans
AD 58 EC Saint-Saulge
AD 78 EC Septeuil et Crespières
Geneanet indices arbres
Superbe enquête Fanny 👏👏 Très agréable à lire
RépondreSupprimerEnquête réussie sur un beau chasseur de chantiers 😂
RépondreSupprimerBeaucoup d’humour pour décrire un séducteur menteur ; mais les épouses se libèrent. Félicité Lefort et Jeanne Victoire Champion fortes de leur magnifiques prénoms et patronymes pourraient faire une ronde ensemble !
RépondreSupprimerUn judicieux résumé de la situation, merci
SupprimerSuperbe article, on se plonge dans l'enquête très facilement
RépondreSupprimerQuelle histoire ! c'est formidable d'avoir pu reconstituer la vie de patachon du ton éphémère parent par alliance.
RépondreSupprimerJ ai regardé il y a bien des Demilly ds le Loiret J y ai vécu 40 ans.....
RépondreSupprimerMerci pour la lecture, il est plausible que cette branche se poursuive par des générations plus proches de nous
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