Elles miroitent au loin ces fières Aiguilles d’Arves, à plus de 3500 mètres d’altitude, emblème de la Maurienne, la plus belle trilogie des Alpes selon l’anglais Coolidge qui en fit la première ascension en 1878.
Un peu en contre-bas - comme déposée sur une butte arrondie, l’église Saint-Nicolas de Montrond, paroisse de Savoie, témoigne de la piété des hommes.
Montrond © Montrond Tourisme |
Ne soyez pas étonnés d’un rendez-vous à Montrond, village dont Jean Claude Roche est natif. Rappelez-vous, lors d’une quittance mutuelle signée à Modane, j’avais déniché ce lointain ancêtre marié à Dominique Clappier, veuve d’un vieux barbon, flanqué de beaux-enfants et tuteur de ces derniers.
Inévitablement, je suis allée à la rencontre de l’enfance de cet ancêtre fils de Balthazard Roche (sosa 600) et à la rencontre des siens, à Montrond, village niché à 1400 mètres d’altitude avec 300 à 400 habitants tout au plus.
Alchimie curieuse de pages tournées, d’indices grappillés, d’éléments de documentation et voilà une série de séquences qui défilent, et s’animent.
AD 73 extrait carte Maurienne |
Balthazard Roche feu Jean-Baptiste, vos parents et amis, vous me semblez encore présents dans votre église paroissiale de montagne au modeste volume, un simple rectangle mais avec un portail en tuf bien taillé selon les accords passés en 1674 par les « communiers » avec un maître-maçon du Val Sesia (1), église consacrée en 1677 par l’évêque de Maurienne.
Vous tous, simples communiers, dans cet élan de piété et de diffusion de l’art baroque, comment avez-vous pu passer et honorer tous ces contrats avec les artistes locaux, pour le riche décor de chœur, le retable, les tableaux et la poutre de gloire. Je sais que le clergé vous incitait à témoigner votre foi et à penser à votre salut, mais vous aviez si peu.
Dans cette petite église Saint-Nicolas, conservée et restaurée, Balthazard Roche je vous vois recevoir le baptême en 1662, nouveau-né de Jeanne Sibué votre mère, puis je suis présente à votre mariage avec Françoise Grand en 1683, et de même lorsque vos fils à leur tour furent tenus sur les fonts baptismaux.
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Votre quotidien Balthazard, celui de vos parents et amis, est rythmé par les saisons, le travail aux champs l’été, et les soins au bétail.
En hiver, qui dure la moitié de l’année, votre horaire est tributaire de votre bétail, très tôt le matin il vous faut nourrir les vaches et les traire, à midi, vous occuper des porcs, puis dans l’après-midi œuvrer pour le nouveau repas de fourrage des vaches. Et le soir Balthazard, il vous faut « ranger » les animaux de l’étable, c’est-à-dire les soigner, encore traire, et « couler » le lait dans le chaudron.
Oh, j’ai bien saisi qu’en hiver, lorsque la bourrasque accumule la neige mètre par mètre contre les murs des maisons de pierre, l’horaire des repas des gens ne peut s’écarter de celui des animaux.
Repas frugaux pour votre famille Balthazard, servis dans une écuelle de terre cuite, avec seulement une cuillère pour avaler, matin et soir, la soupe préparée par Françoise, sorte de bouillie de farine de seigle et d'orge, arrosée d’un peu de lait, dans laquelle vous trempez tous du pain noir et dur cuit deux fois l’an.
Un peu de lard le dimanche j’espère, voire du chou seul légume qui pousse en altitude, ce n’est pas encore l’époque de la pomme de terre, ni celle de la diffusion de la farine de maïs pour faire la « polente ». Une fois le repas achevé, vous relevez la table fixée au mur par des charnières, pour éviter que les poules y grimpent !
Eh oui, dans la pièce unique partagée avec tout le bétail, contre le mur de l’étable des lits superposés pour votre repos, à proximité des vaches, des moutons et volaille, hommes et bêtes vivant ensemble se tiennent chaud.
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Et lors de ces longues journées d’hiver à Montrond, j’imagine les femmes filant et tissant le chanvre, préparant les trousseaux de leurs filles, et vous messieurs, adroits de vos mains, travaillant le bois pour confectionner des sabots, des seilles (2) et des bouteilles de bois.
Et lors des veillées hivernales, j’imagine l’évocation des absents du pays, émigrés le temps de la mauvaise saison ou plus, marchand mercier par exemple,
A trop écouter les récits de ceux tentés par l’aventure d’un ailleurs, un jour vers 1715 - paysage, lieu et famille - furent abandonnés par Jean Claude Roche fils de Balthazard, pour démarrer sa vie d’homme à Modane.
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(1) les communiers sont les habitants d’une paroisse en Savoie et le Val Sesia est une vallée alpine italienne au nord de Turin
(2 la seille est un seau en bois, les bouteilles de bois sont destinées au village proche de Saint-Julien qui a des vignobles
Sources
AD 73 BMS Montrond - St-Jean d'Arves
Indices trouvés sur Geneanet et vérifiés
Ancien site Sabaudia Histoire de Montrond
J'ai adoré !!!
RépondreSupprimermoi aussi j'ai aimé me plonger dans cette époque en lisant ton texte. bravo
RépondreSupprimerUne belle plongée dans le quotidien de la vie à la montagne.
RépondreSupprimerLes Aiguilles d'Arves sont à plus 3500 m d'altitude
RépondreSupprimerUne immersion dans la rude vie de non moins rudes ancêtres.
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup ce type de démarche. Les petites histoires de vie dans la longue histoire de nos ancêtres
RépondreSupprimerTrès chouette rendez-vous dont les petits détails nous font partager au plus proche le quotidien de Balthazard.
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