Les naissances multiples, tel est le généathème d’avril, proposé par la dynamique association Geneatech.
Chaque village possède sa sage-femme, soumise au contrôle du curé, qui doit vérifier qu’elle est capable d’ondoyer le nouveau-né en danger de mort et veiller qu’elle ne se livre pas à des pratiques abortives ou infanticides.
« On exhortera soigneusement les femmes enceintes de communier souvent pour se disposer à la mort, à laquelle elles sont exposées, et là où les prêtres sont en coutume d’aller bénir les accouchées, ils ne leur mettront l’étole ni sur la tête, ni sur le col, ni autrement »
Cet extrait du texte des Constitutions synodales de Saint François de Sales rappelle que l’accouchement représentait alors un péril de mort. Dans les cas les plus favorables, la matrone se borne à laisser faire la nature et à encourager la parturiente. Si l’enfant se présente mal, elle demeure souvent impuissante, faute de connaissances et l’accouchement tourne au drame.
Eglise d'Avrieux - photo personnelle |
Après ce rappel un peu austère, et hélas réaliste, concernant toutes les mères de nos arbres, je vous invite à prendre la route de la Savoie pour un village de montagne en Maurienne.
Il me revient en mémoire la naissance de triplées à Avrieux, en l’an de grâce 1648, le 22 juillet exactement, au foyer de Claude Pascal maréchal et son épouse Barbe.
Trois petits êtres fragiles : Andrée, Françoise, Magdeleine
J'imagine l'effervescence au foyer de mes ancêtres à la 11ème génération, Barbe se doutait-elle d’une possible naissance multiple, elle qui avait déjà eu des enfants, dont François Pascal mon ancêtre. Barbe veuve de Denis Lafaux, s’était remariée avec Claude Pascal en 1634, peu de temps après la grande épidémie de peste de 1630.
J’imagine l’effervescence à trouver de toute urgence trois parrains et trois marraines, pour présenter tout de suite au baptême ces petits êtres fragiles : trois petites filles emmaillotées. Les maisons du village sont groupées, à deux pas de lieu de culte.
Je les vois tous s’engouffrant dans l’église Saint-Thomas Becket d’Avrieux, les marraines tenant avec précaution Andrée, Françoise et Magdeleine : elles ont alors un souffle de vie lorsqu’elles reçurent le baptême le 22 juillet 1648.
AD 73 BMS Avrieux 3E 299 v37 |
Le prêtre a détaillé l’acte de baptême et précisé les noms des parrains et des marraines pour les trois enfants. Sur la seconde page de registre, au même jour, il inscrit le décès de ces petits êtres si fragiles : un souffle de vie de quelques heures.
Barbe survivra à cette naissance et aura au moins un autre enfant : Agnès baptisée en 1652
Restons à Avrieux, où un siècle plus tard dans cette même église - qui entretemps est devenue un des joyaux de l’art baroque savoyard – Anne et Joseph les jumeaux de François Porte et Marie-Françoise Parmier sont baptisés le 17 février 1762.
Joseph Porte mon ancêtre à la 7ème génération fait partie de ma lignée agnatique, de sa sœur jumelle je ne sais rien, sa grande sœur Marie convolera en justes noces en 1771, lui épousera en 1783 Catherine Pascal. Je lève le suspens tout de suite, j’ai plusieurs branches Porte et Pascal sur Avrieux et me suis fait une raison !
Allons non loin de là, toujours en Haute Maurienne, à Modane naissent le 17 septembre 1683 des jumeaux Claude et Pierre, deux garçons d’égrège Mathieu Audé et Sébastienne Martin son épouse. Seul le devenir de Pierre Audé mon ancêtre m’est connu.
Sébastienne la maman avait-elle une ceinture bénie en guise de talisman pour s’assurer de couches faciles et heureuses, elle aura 2 autres enfants.
AD 73 BMS Modane 3E 348 v38 |
Un petit saut dans le temps et toujours à Modane le 6 avril 1757 Marguerite et Jeanne-Marie poussent leur premier cri au foyer de Jean-Baptiste Bernard et Anne Long, couple d’ancêtres mariés depuis 9 ans.
Mille excuses Jeanne-Marie Bernard mon aïeule, si je n’ai pas encore cherché le destin de ta jumelle, et toute ta fratrie, ni étoffé la ligne de vie de tes parents, il va falloir m'y atteler !
Juste un petit tour dans un coin de mon arbre, quelques lignes sur certaines naissances multiples, et la citation de Nicolas Boileau semble de rigueur ;
« hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, polissez le sans cesse et le repolissez, ajoutez quelquefois et souvent effacez. »
N.B : Egrège : avant-nom en Savoie, terme synonyme de sieur ou honorable, usité pour les professions du droit comme les notaires
Sources
- AD 73 BMS Avrieux et Modane
- Relevés GénéMaurienne pour Modane
- Roger Devos, François Martin, Mc Intyre :
Vie et traditions populaires Savoyardes
Quelle tristesse pour ces triplées...
RépondreSupprimerPoignant témoignage raconté à la première personne c'est encore plus émouvant
RépondreSupprimerEmouvante cette petite ronde, et bien souvent triste, qui nous permet de visiter chaque foyer à naissances multiples.
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